Comme toi, j’adore me plonger dans des univers imaginaires, que ce soit à travers un écran ou les pages d’un livre. Parfois, les tropes me font résonner. D’autres fois, la construction d’un monde fantastique me fait mieux comprendre les rouages du monde dans lequel nous vivons. Mais toujours, ce sont les personnages qui nous interpellent et auxquels on s’identifie.
Dans mes livres, j’ai créé des personnages qui – je l’espère – te ressemblent ou auxquels tu peux t’identifier. Cendre et ses insécurités, Sophie qui porte un masque en permanence parce qu’elle ne veut pas appeler à l’aide. Liam, étouffé par sa famille, qui n’ose par leur avouer la vérité.
Dans cet article, je te parle de plusieurs personnages tirés de la littérature, du cinéma ou de la culture populaire. Ils font partie de mes préférés et m’ont beaucoup inspirée.
La seconde Mrs de Winter
Si tu connais le roman Rebecca de Daphné du Maurier, tu auras reconnu le personnage principal : la jeune dame de compagnie qui rencontre un séduisant veuf anglais pendant son séjour à Monte-Carlo. Mais quand elle l’épouse et devient la nouvelle maîtresse de sa demeure ancestrale, elle devra se mesurer au fantôme de Rébecca, sa première épouse, si parfaite, sensuelle et adorée.
Pourquoi n’ai-je pas utilisé son vrai nom, vas-tu me demander ?
Tout simplement parce qu’il n’est pas mentionné. Le seul détail mentionné est que son prénom est particulier et que peu de gens savent l’orthographier, mais rien de plus n’est révélé.
Ce que j’apprécie dans ce livre est la richesse de la langue. Elle est extrêmement évocatrice et la description du jardin et de sa flore dans les premières pages introduit l’intégralité des thèmes du roman.
La seconde Mrs de Winter m’a aidée à créer le personnage de Cendre. Confrontée à des « adultes » deux fois plus vieux qu’elle, elle a du mal à trouver qui elle est vraiment, en tant que femme, épouse et maîtresse d’une grande demeure. Confrontée aux secrets et aux mensonges, elle s’invente des histoires pour combler les trous.
Data
L’androïde de Star Trek : la Nouvelle Génération est un de mes personnages favoris. J’aime la façon dont l’acteur est parvenu à incarner un personnage qui est doté d’une intelligence et d’une force surdéveloppées, mais valorise la coopération, la communication et la protection.
Les épisodes centrés sur Data comptent parmi les plus intéressants de la série, si ce n’est de l’histoire de la télévision, comme « Être ou ne pas être », durant la saison 2.
Ce que j’apprécie chez Data, mais qui n’était peut-être pas conscient dans l’esprit des auteurs, c’est qu’il n’est pas écrit comme un « homme typique ». Son désir de ressembler aux humains est informé par ses interactions avec des personnages des deux sexes ainsi qu’issus de pas mal de races extra-terrestres imaginaires.
Des articles universitaires qui ont analysé la série vous diront que Data est souvent écrit comme le serait un personnage féminin. Je ne suis qu’à moitié d’accord, mais le constat est indéniable sur plusieurs points. Si Lore favorise la violence, le mépris et la conquête de sa place au sommet de la hiérarchie, Data privilégie le dialogue pour désamorcer les conflits, même s’il n’aurait aucun mal à se tirer de la plupart des situations qu’il rencontre par la force ou l’intelligence.
Quand il a créé un enfant, l’androïde Lal qui a choisi de prendre une apparence féminine, il a commencé par le cerveau qu’il a connecté à son propre cerveau, prenant le temps de le développer progressivement pour éviter l’erreur fatale. Il continue de se connecter à elle après « la naissance ». Dans l’épisode où il retrouve sa mère Juliana, ils sont capables d’évoquer la conception de précédents androïdes grâce à des images qui évoquent la grossesse (l’incubation ?) et la fausse-couche ou la mort subite du nourrisson, ou du moins l’équivalent robotique. Je n’aurais jamais pensé voir ce genre de conversations entre deux personnages joués par une femme et un homme.
Enfin, Data est clairement neuroatypique et ses erreurs ou ses maladresses sont réalistes et attendrissantes.
La mère dans Dark Water
Une ou deux fois par an, je sors mes DVD et je regarde les deux Dark Water. D’abord la version japonaise, puis le remake américain. C’est une des rares occasions où l’adaptation US est tout aussi bonne que l’originale, allant même jusqu’à appuyer sur certains thèmes qui n’étaient que suggérés dans le film japonais.
La mère japonaise est traductrice. Travailler sur un texte sombre l’a traumatisée et son ex-mari en a visiblement joué. Elle est obligée de justifier son épisode de crise mentale.
La mère américaine porte le poids d’une enfance avec une mère aux nombreuses addictions. Les événements qui surviennent dans l’appartement et son processus de divorce réactivent ses vieux traumatismes.
Même si je suis parfois un peu lasse du trope de la mère qui doit forcément se sacrifier, ce n’est pas l’impression que me donnent ces adaptations de la nouvelle de Suzuki. Le recueil évoque la jungle urbaine et, à l’intérieur d’espaces clos oppressants, la violence domestique.
Severus Snape
Severus Snape et Krystal Weedon sont mes personnages préférés créés par J. K. Rowling.
Je sais que pour une génération de lecteurs, c’est un peu difficile à croire, mais c’est vrai. Et ce n’est certainement pas à cause d’Alan Rickman. En voyant son personnage d’Obadiah Slope dans Les Chroniques du Barsetshire, je m’imagine mieux pourquoi l’auteure a accepté de lui confier l’interprétation, mais je le trouve trop grand, trop maîtrisé, trop calme.
Ce que j’apprécie chez Snape, c’est qu’il représente la classe ouvrière moldue qui se confronte à la hiérarchie du monde des sorciers à une époque où la montée en puissance de Voldemort risquait de le faire voler en éclats. Voldemort, Snape et Harry, les garçons oubliés, permettent d’évoquer les traumatismes liés à la pauvreté, au manque d’amour parental durant l’enfance, à la violence domestique et aux réactions émotionnelles face à ces événements.
D’un autre côté, Snape illustre également le comportement d’une personne qui reproduit le manque d’attention reçu pendant sa jeunesse ainsi que les tensions entre les maisons. Si je compatis avec le professeur de sciences qui doit gérer les explosions provoquées par Neville (qui reçoit pourtant des instructions précises), je ne peux pas tolérer sa manière de s’imposer par les cris et l’humiliation en espérant que la personne ait un sursaut et devienne enfin magiquement douée en potions. C’est une leçon à retenir quand on cherche à se développer en tant qu’adulte et à se libérer de ses traumatismes d’enfance. On doit chercher à les dépasser si on ne veut pas devenir aussi amer que lui.
Et comme pour Data, j’apprécie le fait qu’il est défini par des tropes et des symboles traditionnellement associés à des personnages féminins.
Dr Louise Banks
En tant que linguiste, j’avais déjà entendu parler de la nouvelle « Story of your life » par Ted Chiang. Je connaissais donc déjà le twist de l’intrigue avant de voir le film.
Premier Contact (Arrival) est et restera un de mes films préférés. Je m’identifie beaucoup au personnage de Louise pour une variété de raisons, notamment le fait qu’elle travaille comme professeur de langues et de linguistique dans une université. Je connais la sensation de travailler dans un bureau en solitaire sur des langues vivantes ou mortes qui nous ouvrent une porte sur la mentalité et la culture d’autres groupes d’humains.
Tout au long du film, j’aime la voir privilégier le dialogue et le partage des ressources afin d’assurer une communication aussi précise et respectueuse que possible avec les extra-terrestres.
Conclusion
J’espère que cette petite liste t’a plu.
Tu connaissais déjà ces personnages ? Et toi, quels sont tes préférés ou ceux qui ont eu le plus d’influence sur toi ?